Tout indique qu’Evgueni Prigojine est mort. Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, à l’origine d’une rébellion contre le Kremlin en juin dernier, figure sur la liste des passagers d’un avion qui s’est écrasé en Russie. Des groupes Telegram associés à cette armée de l’ombre ont confirmé la nouvelle de son assassinat.

Le chef de guerre semble avoir été victime d’un retour de balancier de la part du Kremlin, deux mois jour pour jour après la mutinerie avortée de son groupe paramilitaire. Selon les agences de presse russes, le nom d’Evgueni Prigojine se trouve sur la liste des passagers de cet avion qui devait relier Moscou à Saint-Pétersbourg.

Dix personnes, y compris les membres d’équipage, étaient enregistrées comme étant à l’intérieur de l’appareil. Huit corps ont été trouvés sur le site de l’écrasement, a indiqué un représentant des services d’urgence cité par l’agence RIA Novosti. L’agence TASS a quant à elle mentionné sept corps récupérés.

Au milieu de ces spéculations, les fils de presse officiels de Wagner ont confirmé la mort de leur leader en citant des sources internes. Dimitriï Utkin, le numéro deux du groupe, figurerait aussi parmi les victimes.

Des blogueurs militaires russes affirment que la défense antiaérienne locale est responsable de l’écrasement de l’avion privé appartenant à Wagner. Des vidéos de l’écrasement qui circulent sur les réseaux sociaux corroborent cette thèse d’une attaque délibérée.

Mort ou pas, Evgueni Prigojine traînait une cible dans le dos depuis des semaines. Cet ex-prisonnier, qui jouit d’un soutien non négligeable en Russie, a été vertement critiqué par le Kremlin après sa tentative de coup d’État ratée de juin dernier.

Le président russe, Vladimir Poutine, avait sans détour menacé Prigojine une fois la mutinerie contrecarrée. « Ceux qui ont organisé et préparé la rébellion militaire, qui ont levé les armes contre leurs compagnons d’armes, ont trahi la Russie. Et ils en répondront », avait-il souligné peu après la fin de la rébellion. Les soldats de Wagner avaient notamment abattu un avion radar de première importance pour l’armée russe lorsque leurs canons s’étaient retournés vers Moscou.

 Ceux qui ont organisé et préparé la rébellion militaire, qui ont levé les armes contre leurs compagnons d’armes, ont trahi la Russie. Et ils en répondront.

Avant Prigojine, Sourovikine

Quelques heures plus tôt, les agences de presse russes annonçaient la démission d’un général de l’armée russe proche du groupe Wagner, Sergueï Sourovikine. Surnommé le « général Armageddon », il était l’un des principaux commandants de l’intervention militaire russe en Ukraine.

« Le général d’armée Sergueï Sourovikine a été démis de ses fonctions », a affirmé mercredi matin l’agence de presse d’État RIA Novosti, citant une source au fait des mouvements internes à l’armée.

Cet influent général était disparu de l’espace public depuis l’échec de la rébellion de Wagner. Il a longtemps été considéré comme le principal allié du groupe paramilitaire au sein du ministère russe de la Défense, même si Prigojine réclamait la tête du ministre Sergueï Choïgou et du chef d’état-major, Valeri Guerassimov.

Prévisible, mais déstabilisant

La mort possible de Prigojine va « influencer de manière profonde la politique en Russie », souligne au Devoir la professeure russe Vera Grantseva, qui enseigne à Sciences Po Paris et à l’École des hautes études en sciences économiques de Moscou.

L’événement était sans aucun doute prévisible, estime-t-elle. « Prigojine a fait une chose qui était sans précédent dans la politique russe depuis les 30 dernières années. Il a menacé Poutine, il a publiquement dit que Poutine avait tort. Il a montré l’exemple aux autres participants de la politique russe que c’est possible de se révolter contre Poutine et de le menacer », explique celle qui a travaillé de 2008 à 2016 à la mairie de Saint-Pétersbourg comme experte en relations internationales.

Il devenait donc « indispensable » pour le président Vladimir Poutine de réaffirmer son leadership, dit-elle.

Même si, à court terme, la mort de Prigojine met fin à la déstabilisation créée par la mutinerie, elle pourrait créer un schisme encore plus grand dans la société, croit Mme Grantseva. Dans le camp de ceux qui soutiennent la guerre en Ukraine, il y aura désormais « une division très profonde » par rapport à ceux qui étaient restés fidèles à Prigojine et qui qualifient désormais l’écrasement d’« acte terroriste ».

Luttes de pouvoir

Même si la mort de Prigojine peut avoir été orchestrée pour réaffirmer le leadership de Poutine, elle ne règle en rien les dissensions au sein du régime, fait remarquer Margarita M. Balmaceda, chercheuse associée à l’Institut de recherche ukrainien de Harvard.

La guerre en Ukraine a permis à plusieurs acteurs — et non seulement au groupe Wagner — de fourbir leur arsenal militaire pour tenter d’étendre leur influence. « La guerre en Ukraine est un cadre à l’intérieur duquel différents groupes cherchent à accroître leur puissance militaire sous le couvert du soutien qu’ils offrent au pouvoir central, mais tout en cherchant à faire progresser leurs intérêts », souligne-t-elle, en citant au passage le président tchétchène, Ramzan Kadyrov, mais aussi plusieurs entreprises, dont Gazprom, qui agiraient de la sorte.

Au cours des prochains mois, ceux-ci choisiront soigneusement les cartes qu’ils voudront jouer en gardant à l’oeil les réactions du Kremlin. Mais Mme Balmaceda ne croit pas pour autant que le régime Poutine est à l’orée de sa chute. « Il faudrait une économie plus faible pour qu’il tombe dans les prochains mois. »

Avec l’Agence France-Presse

Advertisement

2 Commentaires

  1. I would like to thnkx for the efforts you have put in writing this site. I’m hoping the same high-grade blog post from you in the upcoming as well. Actually your creative writing skills has inspired me to get my own web site now. Actually the blogging is spreading its wings quickly. Your write up is a great example of it.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici