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« ÇA M’A FAIT TELLEMENT MAL » : CE QUE YAYA TOURÉ N’A JAMAIS PARDONNÉ À FRANÇOIS ZAHOUI

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La scène se passe le 3 décembre 2025, dans le décor feutré de « Zack en roue libre ». À 42 ans, Yaya Touré, l’icône de Manchester City, du FC Barcelone et de la Côte d’Ivoire, accepte pour la première fois de revenir, cœur ouvert, sur ce qui reste l’une des blessures les plus profondes de sa carrière : la finale perdue de la CAN 2012… et son conflit silencieux avec l’entraîneur François Zahoui.

Un retour en arrière chargé d’émotion. Assis face au micro, le visage calme mais les yeux et la voix qui trahissent encore quelque chose de brisé, Yaya ne tourne pas autour du pot. « Cette finale… c’était un tournoi bizarre, très bizarre. Et il n’y a pas beaucoup d’hommes qui savent ce qu’il s’est vraiment passé », souffle-t-il.

La CAN 2012 est un chapitre douloureux dans l’histoire des Éléphants. Une campagne parfaite : aucun but encaissé, un collectif soudé, une équipe au sommet de son talent. Et puis cette finale cruelle, perdue aux tirs au but contre la Zambie d’Hervé Renard.

Un drame national. Mais aussi, on le comprend désormais, une blessure personnelle pour Yaya Touré.

« C’est moi qui me suis battu pour qu’on ait un coach ivoirien »

Dans son récit, l’ancien Ballon d’or africain remonte au début du tournoi. « On ne voulait pas d’un grand entraîneur européen. On a dit au président Sidy Diallo : on veut un coach ivoirien, humain, proche de nous. Et c’est moi qui étais en tête de file. »

Il raconte comment il a convaincu Didier Drogba, Kolo Touré, Salomon Kalou. Comment il est allé « tirer les oreilles du président » pour offrir à François Zahoui sa chance.

« J’ai dit au président : ce n’est pas la capacité qui compte. Ce sont les joueurs qui font la différence. Faites-moi confiance. »

Zahoui devient donc sélectionneur. Et malgré les doutes, malgré les critiques, l’équipe réalise une campagne quasi parfaite.

« On voyait les journalistes le détruire. On faisait bloc derrière lui. On le protégeait. » Un lien fort. Une confiance rare. Mais brisée en un instant.

La finale : le point de rupture

« Quand on arrive en demi-finale, raconte Yaya, il y a déjà un journaliste qui le provoque en lui demandant : Coach, est-ce vraiment vous qui dirigez l’équipe ? Est-ce que vos consignes sont déterminantes ? Est-ce que ce ne sont pas plutôt les joueurs qui font le travail à votre place ? Là, il a pété un câble. Il a explosé, en répondant : Non, mais vous pensez quoi ? C’est moi qui fais ces joueurs. »

Puis arrive le moment fatal : son remplacement au soir du 12 février 2012. « Comment tu peux sortir tes meilleurs tireurs à la 90e minute, quand tu sais qu’on va aller aux pénaltys ? Tu sors Yaya Touré, Salomon Kalou, même Maestro. Ça n’a aucun sens. »

Le milieu ivoirien insiste : il n’a pas demandé à sortir. Il voulait tirer. Il s’était préparé. « À City, je ratais presque jamais un pénalty. Mais tu fais entrer des jeunes qui n’ont jamais tiré à ce niveau-là… Tu mets une pression énorme sur eux. »

Il se tait un instant. Respire. Puis lâche : « Ça, je ne l’ai jamais pardonné. Ou presque jamais. Ça m’a fait tellement mal. »

Des larmes que personne n’a oubliées

Lorsqu’il évoque la fin de la rencontre, sa voix se brise à peine perceptiblement. « Les gens m’ont vu pleurer au stade. Je pleurais parce que ce trophée… il était à nous. On avait tout fait. Tout. »

Il balaie d’un geste les rumeurs de « destin » ou de « superstitions ». « Ces histoires de morts en Zambie, de je ne sais quoi… Moi je ne connais pas ça. Ce trophée était à nous. »

Mais surtout, ce qu’il ne digère pas, même treize ans plus tard, c’est la trahison de confiance.

« Ce monsieur-là était coach de la Côte d’Ivoire grâce à nous. J’ai contribué. Je me suis battu pour lui. Et après, parce qu’un journaliste est entré dans sa tête, il perd la tête. »

Les mots sont lourds. Sans haine, mais avec une déception profonde. Un mélange de regret, de fierté blessée et d’amertume encore vive. « Je suis resté zen, conclut Yaya sur un souffle. J’ai tout gardé pour moi. Mais à l’intérieur… j’avais tellement mal. »

En 2015, il remporte la première Coupe d’Afrique des nations de sa carrière après avoir perdu deux finales en 2006 et en 2012. C’est même lui qui remet, en tant que capitaine de l’équipe, le trophée au président de la République, Alassane Ouattara.

Mais, treize ans après, l’une des plus grandes légendes du football africain avoue enfin un secret longtemps protégé : la CAN 2012 n’a pas seulement été une défaite sportive.

C’était une blessure humaine. Une rupture émotionnelle. Et peut-être, le seul épisode de sa carrière qu’il n’a jamais réussi à refermer.

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