La Côte d’Ivoire devient un refuge pour les producteurs d’or, face aux tensions au Sahel

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Avec 600 tonnes de réserves d’or et une production en hausse depuis plus d’une décennie (environ 60 tonnes d’or en 2024), la Côte d’Ivoire est devenue un poids lourd du secteur aurifère en Afrique de l’Ouest. Avec les tensions au Mali et au Burkina Faso, des compagnies se pressent à Abidjan.
Avec 600 tonnes de réserves d’or et une production en hausse depuis plus d’une décennie (environ 60 tonnes d’or en 2024), la Côte d’Ivoire est devenue un poids lourd du secteur aurifère en Afrique de l’Ouest. Avec les tensions au Mali et au Burkina Faso, des compagnies se pressent à Abidjan.

Avec 600 tonnes de réserves d’or et une production en hausse depuis plus d’une décennie (environ 60 tonnes d’or en 2024), la Côte d’Ivoire est devenue un poids lourd du secteur aurifère en Afrique de l’Ouest. Avec les tensions au Mali et au Burkina Faso, des compagnies se pressent à Abidjan.

Avec l’acquisition, jeudi 1er mai, du projet aurifère Doropo, Resolute Mining s’apprête à diversifier davantage sa production en Afrique de l’Ouest. La compagnie australienne, dont le PDG a été brièvement détenu au Mali en novembre 2024, rejoint en Côte d’Ivoire d’autres producteurs ayant fait du pays une destination privilégiée de leurs investissements. Face à un climat des affaires dégradé dans les pays du Sahel, la nation éburnéenne s’impose comme un refuge pour plusieurs compagnies.

Un climat des affaires « difficile » au Sahel

Au Mali, Resolute a dû verser 160 millions $ en 2024 pour obtenir la libération de son dirigeant Terence Holohan, dans le cadre d’un litige fiscal où Bamako réclame entre 300 et 600 milliards FCFA aux producteurs d’or. Si sa mine malienne Syama reste en activité (63 % de la production du groupe en 2024), l’épisode semble avoir accéléré la volonté de diversifier les opérations. Resolute n’a pas évoqué explicitement les tensions maliennes au moment d’investir en Côte d’Ivoire, se contentant de reconnaître la nécessité de « diversifier le profil de production ».

Fortuna Mining s’est en revanche montrée plus directe. Au moment de quitter le Burkina Faso, où la compagnie canadienne a vendu mi-avril sa mine d’or Yaramoko, son PDG Jorge Ganoza a invoqué le « climat des affaires de plus en plus difficile » dans le pays. La transaction de 130 millions $ renforce les liquidités de Fortuna et pourrait lui permettre d’investir davantage en Côte d’Ivoire, où elle exploite la mine ivoirienne de Séguéla.

Premier producteur d’or en Afrique de l’Ouest, Endeavour Mining a amorcé plus tôt ce recentrage. Entre 2022 et 2024, le groupe est passé de quatre à deux mines au Burkina Faso, réduisant la part du pays dans sa production globale de 52 % à 39 %. Pour la première fois, en 2024, la production d’or d’Endeavour en Côte d’Ivoire a même dépassé celle du Burkina Faso. Avec 438 524 onces produites, les mines ivoiriennes Ity et Lafigué ont produit davantage que les actifs burkinabè Houndé et Mana (435 532 onces). Cette dynamique devrait se poursuivre avec le développement du projet ivoirien Assafou, dont le potentiel est estimé à 329 000 onces par an sur dix ans.

D’une manière générale, un investisseur de la sous-région reconnait un statu quo au niveau de la demande de financement dans les pays miniers du Sahel. « Par contre, sur les pays comme la Côte d’Ivoire et la Guinée, oui, il y a de la demande. Il y a beaucoup plus de demandes », souligne-t-il.

Les atouts d’Abidjan face au Sahel

Si plusieurs compagnies minières réorientent leurs investissements vers la Côte d’Ivoire, c’est d’abord en raison de son potentiel aurifère encore sous-exploité. Selon les autorités, les réserves d’or atteignent 600 tonnes. Le gouvernement entend s’appuyer sur cette ressource pour dépasser le Mali et le Burkina Faso. En juin 2024, le ministre des Mines Mamadou Sangafowa-Coulibaly a fixé un objectif de 100 tonnes d’or dans les cinq ans, contre environ 60 tonnes l’année dernière.

Cette ambition est partagée par Jean-Claude Diplo, ancien président de la Chambre des Mines, qui estime que la Côte d’Ivoire pourrait rivaliser avec le Ghana d’ici 2030, tout en dépassant ses voisins sahéliens. Pour atteindre ces objectifs, le pays mise sur un climat des affaires bien plus favorable que celui du Sahel.

« La Côte d’Ivoire bénéficie d’un environnement économique relativement stable, de l’absence de pressions sécuritaires majeures, et d’une stratégie clairement affichée d’attractivité des investissements », explique Ahamadou Mohamed Maïga, directeur exécutif du cabinet Extractive & Energy Investment Council.

La Côte d’Ivoire attire, mais elle n’est pas seule. Le Ghana reste un poids lourd régional, et la Guinée suscite un intérêt croissant de la part des investisseurs pour l’exploration aurifère, notamment grâce à ses ressources encore peu exploitées par des producteurs industriels. Abidjan a par ailleurs entamé en 2024 la révision de son code minier. Il reste à voir si les nouvelles dispositions renforceront l’attractivité du pays ou introduiront de nouvelles contraintes pour les opérateurs.

Emiliano Tossou

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