Fin d’une époque : après 65 ans la France met fin à sa présence militaire permanente en Afrique de l’Ouest

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L’histoire retiendra cette date comme celle d’un tournant stratégique majeur. L’armée française a officiellement achevé son retrait du Sénégal, marquant ainsi la fin de 65 années de présence militaire permanente en Afrique de l’Ouest, une région longtemps considérée comme l’un des piliers de l’influence postcoloniale de Paris sur le continent.

La cérémonie de transfert s’est déroulée près de Dakar, où le général Ianni, commandant des forces françaises en Afrique, a remis les clés de la base aérienne française au commandant en chef sénégalais, le général Cissé. La base, héritée de l’époque coloniale, était l’un des derniers bastions militaires français dans la sous-région.

Depuis l’indépendance du Sénégal en 1960, la France y avait maintenu une présence stratégique continue. Mais cette situation a été remise en cause avec l’arrivée au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye, élu président en 2024. Ce dernier a exprimé à plusieurs reprises que la souveraineté du Sénégal était incompatible avec le maintien de troupes étrangères sur son sol.

Prisonniers Africains au camp de Luckenwalde près de Berlin Stalag III A, Luckenwalde bei Berlin. (© Dauerausstellung Heimatmuseum Luckenwalde)

Faye a également demandé des excuses officielles de la France pour les exactions coloniales, dont le massacre du camp de Thiaroye en 1944, où des tirailleurs sénégalais démobilisés et non armés avaient été abattus par l’armée française. Il souhaite désormais une relation renouvelée avec Paris, fondée sur le respect mutuel et l’égalité des partenaires.

Le Sénégal n’est pas un cas isolé. La Côte d’Ivoire et le Tchad ont également vu les troupes françaises quitter progressivement leur territoire au cours des derniers mois. Toutefois, quelques dizaines de conseillers militaires français restent actifs dans certains pays, notamment à Abidjan, dans un cadre de coopération bilatérale réduite.

Cette série de retraits traduit une dynamique plus large : la fin d’un cycle historique de présence militaire française en Afrique de l’Ouest, amorcée à la faveur de crises politiques, de montée du sentiment anti-français et d’une volonté croissante d’autonomie stratégique des États africains.

Le retrait français s’inscrit dans un contexte de discussions houleuses. Le président Emmanuel Macron avait déclaré que les accords de retrait avaient été conclus de bonne foi et que la France, par courtoisie diplomatique, avait laissé la communication aux pays africains concernés. Mais cette version est contestée par Dakar et N’Djamena, qui affirment que la décision de rupture a été prise unilatéralement par leurs gouvernements, sans négociation véritable avec Paris.

La France avait déjà été poussée vers la sortie au Niger, au Mali et au Burkina Faso, où des juntes militaires, arrivées au pouvoir par des coups d’État, ont clairement rompu avec la tutelle française. Elles ont désormais le soutien stratégique de la Russie.

Aujourd’hui, le seul pays africain où la France [aux aux côtés de plusieurs autres pays occidentaux ainsi que la Chine], maintient officiellement une base militaire permanente reste Djibouti, positionné stratégiquement sur la mer Rouge. Environ 1 500 soldats français y sont encore stationnés, dans un contexte géopolitique mondial de plus en plus incertain pour les Occidentaux.

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