Le Forum des Aînés d’Afrique de l’Ouest plaide pour un dialogue inclusif en Côte d’Ivoire avant la présidentielle, à l’issue d’une mission de médiation de cinq jours.
À trois mois de l’élection présidentielle prévue le 25 octobre, le Forum des Aînés d’Afrique de l’Ouest (WAEF) a achevé vendredi une mission de médiation en Côte d’Ivoire, au terme de laquelle il exhorte les acteurs politiques ivoiriens à renouer le dialogue afin d’éviter une nouvelle crise électorale.
Conduite par l’ancien président béninois Boni Yayi, la délégation comprenait plusieurs figures de la diplomatie régionale, dont l’ex-président nigérian Goodluck Jonathan et l’ancien représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, Mohammed Ibn Chambas. Elle a rencontré, entre autres, le vice-président ivoirien, le Conseil constitutionnel, la Commission électorale indépendante (CEI), des candidats à la présidentielle, des responsables politiques, le ministre de l’Intérieur et des représentants de la société civile.
« Poursuivre le dialogue »
À l’issue de sa mission, le WAEF a salué l’ouverture des institutions consultées, tout en appelant à « approfondir les efforts de recherche de consensus » dans les semaines à venir.
« Le WAEF encourage vivement toutes les parties prenantes à maintenir des lignes de communication ouvertes, à approfondir les efforts de recherche de consensus et à poursuivre le dialogue dans les semaines précédant les élections », a déclaré Boni Yayi dans un communiqué final transmis à la presse.
« Bien que le temps qui nous sépare des élections soit limité, il est encore possible d’accomplir beaucoup grâce à un engagement collaboratif et à une volonté politique », a-t-il ajouté.
Le Forum a également salué la disposition de certains acteurs à engager un dialogue constructif avec le gouvernement. « Nous espérons que de telles discussions aboutiront à des solutions consensuelles, qui privilégient les intérêts de la nation plutôt que les considérations partisanes », poursuit le texte.
Une demande rejetée
Cet appel du WAEF intervient alors que l’opposition ivoirienne, toutes tendances confondues, réclame l’ouverture d’un dialogue politique avec le pouvoir en vue de réformes du système électoral. Des partis comme le PDCI de Tidjane Thiam, le FPI de Pascal Affi N’Guessan, le Cojep de Charles Blé Goudé, le MGC de Simone Gbagbo ou encore le PPA-CI de Laurent Gbagbo insistent sur la nécessité de négociations pour garantir un scrutin apaisé et inclusif le 25 octobre prochain.
Mais cette demande de reprise du dialogue politique a été clairement rejetée par le gouvernement. Interrogé mercredi 26 février 2025 à l’issue du Conseil des ministres, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, a renvoyé l’opposition aux conclusions du dernier dialogue politique tenu en 2022.
Le gouvernement considère que ce processus a permis de constater que les institutions fonctionnent normalement et que toute question relative à leur fonctionnement doit être traitée à travers elles. Il accuse par ailleurs certains acteurs politiques de vouloir instrumentaliser la notion de dialogue à des fins partisanes, tout en réaffirmant que les canaux institutionnels sont toujours ouverts.
Appel à la retenue
Le contexte électoral reste délicat dans le pays d’Afrique de l’Ouest où les précédents scrutins, notamment en 2010 et 2020, ont été marqués par de fortes violences. Le rejet de plusieurs candidatures d’opposants pour des raisons judiciaires ou administratives attise les tensions. Parmi les personnalités concernées figurent Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé, Guillaume Soro et Tidjane Thiam.
Face à ce climat, le WAEF appelle à la retenue. « Nous exhortons les acteurs politiques, les médias et les influenceurs à s’abstenir de toute rhétorique incendiaire, de la diffusion de fausses informations et des discours de haine », a insisté Boni Yayi. La mission a également salué les efforts de la CEI et du Conseil constitutionnel, tout en plaidant pour « davantage de transparence » et une meilleure communication à destination du public.
À la jeunesse ivoirienne, la délégation a lancé un appel à l’engagement pacifique : « Ne vous laissez pas exploiter comme instruments de violence. La Côte d’Ivoire de demain vous appartient. »
Le Forum a réaffirmé sa volonté d’accompagner le pays jusqu’au scrutin présidentiel. « La Côte d’Ivoire a une occasion unique de tirer les leçons du passé et de consolider ses acquis démocratiques », conclut le communiqué.
Samuel KADIO