Le président Mohamed Bazoum est séquestré, avec sa famille, à l’intérieur de sa résidence par des militaires. Les raisons ayant poussé les militaires à agir restent floues et la situation ne semble toujours pas sous contrôle.
L’accès à la présidence du Niger, à Niamey, était bloqué, mercredi 26 juillet, par des membres de la garde présidentielle, commandée par le général Omar Tchiani. « Tôt ce mercredi matin, des éléments de la garde présidentielle ont engagé un mouvement d’humeur antirépublicain et tenté en vain d’obtenir le soutien des forces armées nationales et de la garde nationale », a relaté la présidence nigérienne, dans un message publié sur Twitter – rebaptisé X – ensuite supprimé, à 13 h 30. « Le président de la République et sa famille se portent bien », a-t-elle ajouté. Une information confirmée par un proche du chef de l’Etat joint par Le Monde, qui a précisé que Mohamed Bazoum et son épouse se trouvaient dans la résidence présidentielle.
Pour l’heure, les raisons ayant poussé les militaires à l’origine de ce mouvement de colère restent floues et la situation ne semble toujours pas sous contrôle. « L’armée et la garde nationale sont prêtes à attaquer les éléments de la GP [garde présidentielle] impliqués dans ce mouvement d’humeur s’ils ne reviennent pas à de meilleurs sentiments », a signalé la présidence sur X (anciennement Twitter).
Appels à la libération du président
La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), actuellement présidée par le Nigeria, a dit avoir pris connaissance « avec stupeur et consternation » de la « tentative de coup d’Etat au Niger », dans un communiqué publié mercredi après-midi. Elle « condamne avec vigueur cette tentative de prise du pouvoir par la force et appelle les auteurs de cet acte à libérer immédiatement et sans condition le président de la République démocratiquement élu ». Selon les informations du Monde, une délégation de la Cedeao doit se rendre au plus vite à Niamey. En début de soirée, la Cedeao a fait savoir que le président béninois, Patrice Talon, était en route pour le Niger afin de servir de médiateur.
La France « condamne fermement toute tentative de prise de pouvoir par la force » au Niger, son principal allié au Sahel. « La France (…) suit attentivement l’évolution de la situation », a fait savoir la porte-parole du ministère des affaires étrangères. De son côté, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, « condamne avec la plus grande fermeté toute tentative de prise de pouvoir par la force et d’atteinte à la gouvernance démocratique, à la paix et à la stabilité au Niger » et « appelle tous les acteurs concernés à faire preuve de retenue et à assurer la protection de l’ordre constitutionnel ».
Les Etats-Unis se sont déclarés pour leur part « profondément préoccupés » par la situation au Niger, et ont appelé à la libération immédiate du président, Mohamed Bazoum. La secrétaire générale de la francophonie, Louise Mushikiwabo, a elle aussi demandé « le respect de l’intégrité physique et la libération immédiate et sans conditions » du président du Niger.
Une histoire jalonnée de coups d’Etat
Ce mercredi matin, tant les accès à la résidence de Mohamed Bazoum qu’aux bureaux du complexe présidentiel étaient interdits. En revanche, aucun dispositif militaire particulier n’était visible dans le quartier où se trouve la présidence, la circulation y était normale et aucun coup de feu n’a été entendu, a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP). Quelques dizaines de manifestants se sont rassemblés dans le centre de Niamey pour apporter leur soutien au chef de l’Etat, ont constaté des journalistes de l’agence.
Mohamed Bazoum avait déjà vu son pouvoir vaciller peu avant son investiture, en 2021. Dans la nuit du 30 au 31 mars, des tirs à l’arme lourde avaient retenti aux abords de la présidence. Le gouvernement avait alors annoncé avoir arrêté plusieurs personnes et repris la situation en main, qualifiant les faits de tentative de coup d’Etat. Le tout nouveau président avait ensuite fait le ménage au sein de la Sécurité rapprochée, le groupe qui, avec la garde présidentielle, est chargé d’assurer la sécurité au sein du palais. Selon une source sécuritaire nigérienne, Mohamed Bazoum avait alors remplacé la plupart des effectifs de ce groupe, espérant ainsi se prémunir de tout nouveau mouvement d’humeur.
Le Niger est un partenaire privilégié de la France au Sahel, une région en proie à la violence djihadiste. L’histoire de ce pays vaste, pauvre et désertique est jalonnée de coups d’Etat. Depuis l’indépendance de cette ex-colonie française, en 1960, il y en a eu quatre : le premier en avril 1974 contre le président Diori Hamani, et le dernier en février 2010, qui a renversé le président Mahamadou Tandja. Sans compter les nombreuses tentatives de putsch.