(Jérusalem) Le Hamas a menacé lundi soir d’exécuter des otages israéliens en réaction aux frappes israéliennes qui se multiplient sur la bande de Gaza au troisième jour de l’offensive massive déclenchée par le mouvement islamiste palestinien, qui a provoqué la sidération dans le pays.
CE QU’IL FAUT SAVOIR
- Le Hamas a lancé samedi une offensive militaire surprise en tirant des milliers de roquettes vers Israël ;
- L’armée israélienne réplique depuis avec des frappes aériennes sur la bande de Gaza ;
- Un siège complet a été imposé lundi à la bande de Gaza ;
- Le Hamas menace d’exécuter des otages civils en réaction aux raids israéliens sur Gaza ;
- Environ 150 personnes seraient détenues par le Hamas, selon le gouvernement israélien ;
- Le bilan se chiffre à plus de 800 morts du côté israélien et 687 du côté palestinien.
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Cette menace intervient après le « siège total » imposé lundi par Israël à la bande de Gaza contrôlée depuis 2007 par le Hamas. Elle est pilonnée par l’armée israélienne en réponse à l’attaque meurtrière sans précédent lancée samedi par le Hamas par voie de terre, d’air et de mer, comparée par Israël aux attentats du 11 septembre 2001.
Lundi, l’armée israélienne a annoncé avoir repris le « contrôle » des localités du sud du pays prises pour cible. « Nous sommes déjà au cœur de la campagne, mais ce n’est que le début », a déclaré le premier ministre Benyamin Nétanyahou à de hauts responsables locaux dans le sud d’Israël, là où des combattants du Hamas ont lancé leur attaque-surprise. « Ce que le Hamas va vivre sera difficile et terrible […], nous allons les vaincre avec de la force, énormément de force », a promis M. Nétanyahou.
Mais le Hamas a mis en garde Israël : « Chaque fois que notre peuple sera pris pour cible sans avertissement, cela entraînera l’exécution d’un des otages civils […]. L’ennemi ne comprend pas le langage humanitaire et éthique, donc nous allons leur parler un langage qu’ils comprennent », a-t-il souligné dans un communiqué. Plus d’une centaine de personnes ont été enlevées en Israël par le Hamas, selon le gouvernement.
La guerre a fait près de 1400 morts de part et d’autre, selon les bilans officiels.
« Massacrés »
Selon le bureau de presse gouvernemental, plus de 800 Israéliens ont été tués depuis le début de l’offensive samedi. « À ma connaissance, depuis la Shoah, il n’y a jamais eu autant de juifs tués en un seul jour », a déclaré le président israélien, Isaac Herzog.
Samedi, 250 personnes ont été massacrées dans une rave organisée dans le désert israélien près de la bande de Gaza, selon le porte-parole de l’ONG Zaka, Moti Bukjin, qui a participé à la collecte des corps.
Le ministère israélien de la Santé a également fait état de 2616 blessés. Côté palestinien, 687 personnes ont été tuées et 3727 blessées, selon les autorités locales.
Des dizaines de milliers de soldats israéliens sont déployés autour de la bande de Gaza, mince territoire côtier peuplé de 2,3 millions de Palestiniens et contrôlé par le Hamas depuis 2007.
PHOTO MOHAMMED ABED, AGENCE FRANCE-PRESSE
Des Palestiniens cherchent des survivants après une frappe aérienne israélienne sur des bâtiments du camp de réfugiés de Jabalia, dans la bande de Gaza, le 9 octobre.
Dans la foulée de l’annonce du « siège » de Gaza, le ministre israélien de l’Énergie, Israël Katz, a ordonné la « coupure immédiate » de l’approvisionnement en eau de cette enclave palestinienne à laquelle Israël fournit 10 % de la consommation annuelle.
L’armée s’efforce aussi de sauver les Israéliens pris en otage par le Hamas, plus de 100 selon le gouvernement israélien, du jamais vu dans l’histoire du pays pris par surprise par cette offensive lancée au dernier jour des fêtes juives de Souccot, « de loin le pire jour de l’histoire d’Israël », selon un porte-parole de l’armée.
« Ce qui s’est passé est sans précédent en Israël », a reconnu M. Nétanyahou. Et dans une allocution télévisée lundi soir, il a appelé « les dirigeants de l’opposition à former immédiatement un gouvernement d’union nationale d’urgence sans condition préalable ».
PHOTO EYAD AL-BABA, AGENCE FRANCE-PRESSE
Un membre de la défense civile palestinienne porte un garçon blessé sauvé des décombres de la maison familiale détruite lors d’une frappe aérienne israélienne sur la ville de Gaza, le 9 octobre.
L’armée israélienne estime à un millier le nombre de combattants du Hamas ayant participé à « l’invasion d’Israël », a déclaré un porte-parole sur X.
L’armée a par ailleurs annoncé avoir tué « plusieurs suspects armés » qui s’étaient infiltrés en Israël à partir du Liban.
Le Hezbollah pro-iranien a indiqué lundi avoir bombardé deux casernes israéliennes, en réponse à la mort de trois de ses membres par des bombardements israéliens dans le sud du Liban, sur fond de craintes d’escalade.
Les États-Unis ont averti dans la soirée le mouvement chiite libanais de ne pas ouvrir un deuxième front contre Israël, après celui ouvert par le Hamas palestinien depuis la bande de Gaza.
« Nous sommes profondément inquiets que le Hezbollah ne prenne la mauvaise décision et n’ouvre un deuxième front dans ce conflit », a déclaré à Washington un haut responsable de défense américain.
Le Hezbollah, bête noire d’Israël, a annoncé dans des communiqués distincts la mort de trois de ses membres, qualifiés par le groupe de « martyrs suite à l’agression sioniste dans le sud du Liban lundi après-midi ».
Il a indiqué plus tard avoir bombardé deux casernes israéliennes, en utilisant « des missiles guidés et des obus de mortier qui ont atteint directement » leurs cibles.
Le Hezbollah a qualifié son attaque de « première réponse » à la mort de ses membres.
Étrangers tués
Nombre de ressortissants d’autres pays, certains ayant aussi la nationalité israélienne, ont été tués dans l’offensive du Hamas, notamment 12 Thaïlandais, 10 Népalais, au moins neuf Américains, deux Français et un Canadien, selon les autorités de ces pays.
Pour Yaakov Shoshani, 70 ans, un habitant de Sdérot, dans le sud d’Israël, « les systèmes ont tous échoué ici, qu’il s’agisse du renseignement, du renseignement militaire, civil, des systèmes de détection, de la barrière frontalière [avec Gaza], tout a échoué ».
PHOTO IBRAHIM HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE
Une salve de roquettes est tirée depuis la bande de Gaza survole une zone proche de la frontière avec Gaza, le 9 octobre.
« C’est de loin le pire jour de l’histoire d’Israël. Jamais auparavant autant d’Israéliens n’avaient été tués en une seule fois », a déclaré un porte-parole de l’armée, selon lequel il pourrait s’agir « à la fois d’un 11 septembre et d’un Pearl Harbour ».
Après avoir franchi la barrière frontalière qu’Israël considérait imprenable, des combattants du Hamas se sont engouffrés dans des localités juives du sud du pays. Là, des hommes armés sont allés de maison en maison, abattant des citoyens ou les enlevant pour les ramener à Gaza.
« Depuis la Shoah, nous n’avons pas été témoins de scènes de juifs, des femmes, des enfants et des grands-parents pris sur des camions en captivité », a encore dit M. Herzog.
« Bouleversé »
Un ancien soldat israélien a déclaré que la guerre israélo-arabe de 1973, qui reste un traumatisme national en Israël, était « peu de choses » comparées au raid du Hamas de samedi, ajoutant qu’il s’agissait d’un « très grave échec ».
PHOTO JACK GUEZ, AGENCE FRANCE-PRESSE
Un membre des forces de sécurité israéliennes se tient près d’une voiture touchée par une roquette tirée depuis Gaza, dans la ville de Sdérot, dans le sud d’Israël, le 9 octobre.
L’offensive du Hamas a été lancée 50 ans et un jour après cette guerre qui avait pris Israël totalement par surprise et fait 2600 morts côté israélien en trois semaines de combats.
Les Brigades Al-Qassam, branche militaire du Hamas, ont annoncé avoir déclenché cette offensive majeure pour « mettre fin aux crimes de l’occupation ».
PHOTO MENAHEM KAHANA, AGENCE FRANCE-PRESSE
Un soldat israélien se protège lors d’une attaque à la roquette depuis la bande de Gaza, le 9 octobre à Sdérot.
L’attaque du Hamas a été condamnée par de nombreux pays occidentaux. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, tout en reconnaissant les « inquiétudes légitimes d’Israël pour sa sécurité », s’est dit « profondément bouleversé » par l’annonce des autorités israéliennes du « siège complet » de la bande de Gaza.
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a lui mis en garde Israël contre une attaque « indiscriminée » de civils à Gaza, qui « ne ferait qu’accroître les souffrances et renforcer la spirale de la violence dans la région ».