« C’était chaud, mais c’était intéressant. » C’est en ces termes que Damana Pickass a résumé l’interrogatoire marathon auquel il a été soumis, aux côtés de cinq autres cadres de l’opposition, dans les locaux de la Préfecture de Police d’Abidjan.
Pendant près de 19 heures, ils ont été entendus, du mardi 10 août jusqu’au mercredi 6 heures du matin, par les enquêteurs du service des enquêtes générales.
Parmi les personnes convoquées figuraient Dia Houphouët, Blaise Lasme, Koua Justin, Dahi Nestor et Samba David. Tous jouent un rôle central dans la mobilisation pour la marche du Front commun annoncée pour le samedi 9 août 2025 à Yopougon.
Plus tard dans la journée, le PPA-CI a organisé une cérémonie de réception en leur honneur à son siège de la Riviera-Bonoumin. Une occasion pour Damana Pickass de revenir publiquement sur cette longue garde à vue.
« Qu’ils apportent des preuves »
Selon le deuxième vice-président du Conseil stratégique et politique du parti PPA-CI, les convocations ont été reçues tôt dans la matinée du mardi, sans indication claire sur leur motif.
« Nous n’avons pas voulu nous dérober« , a-t-il confié. Une fois sur place, les cadres de l’opposition se sont vu notifier une interdiction de quitter Abidjan, « sur ordre du procureur« , sans plus d’explications.
« On a cru que ça allait prendre fin et qu’on rentrerait à midi. » Mais, l’interrogatoire a pris une autre tournure dans l’après-midi, avec l’intervention de la Direction de la Surveillance du Territoire (DST), venue interroger les responsables sur les violences survenues à Yopougon dans la nuit du 1er au 2 août.
Ce soir-là, des individus armés et encagoulés avaient attaqué un bus de la SOTRA et un véhicule de police, faisant un blessé grave.
« C’est ce qui a été harassant. Nous avons été pris séparément, pour être interrogés« , a expliqué Damana Pickass, dénonçant une pression psychologique intense. Les enquêteurs ont évoqué des aveux supposés de militants arrêtés, accusant des cadres du PPA-CI d’avoir donné des ordres.
Il a rappelé que le parti n’avait aucun intérêt à recourir à de tels actes, la marche étant dûment déclarée et la ligne politique du PPA-CI reposant sur la non-violence.
« Nous leur avons demandé que ces militants, qui affirment avoir reçu des ordres, précisent quel cadre du parti les leur a donnés, et qu’ils apportent des preuves », a martelé Pickass.
« On a discuté pendant des heures… Tout était pratiquement réglé, mais il y avait trop de communications entre la préfecture et l’extérieur. On disait que le secrétaire général appelait à la sédition, ce qui compliquait les choses… On est restés là jusqu’à 6h. »
Révélations sur Dia Houphouët

Au terme d’une nuit blanche ponctuée de va-et-vient entre services, de procès-verbaux et d’appels extérieurs, les six responsables ont finalement été autorisés à rentrer chez eux dans la matinée du mardi.
« Grâce à vos soutiens, on a pu tenir », a déclaré Damana Pickass, saluant la solidarité de ses camarades et des sympathisants du parti.
Avant de clore son propos, le vice-président du PPA-CI a tenu à saluer l’attitude de l’un de ses compagnons d’infortune, Dia Houphouët Augustin Yohou, député de Yopougon et secrétaire exécutif en charge de la mobilisation au PDCI.
« Il faut lui rendre hommage, a insisté Pickass. On ne peut pas traiter un député de la nation de cette manière… Depuis quelques jours, il était question de lui retirer son immunité parlementaire. Mais il est resté serein tout au long. »
Samuel KADIO