
Faire des jeunes la cheville ouvrière du développement économique et industriel, tel est le vœu de la Côte d’Ivoire qui est, cette année, le premier pays africain à accueillir le Congrès mondial autour des services publics d’emplois. Employabilité, formation et besoin des entreprises…, tous les sujets passent dans cet entretien accordé à La Tribune Afrique par Mamadou Touré, ministre de la Promotion de la Jeunesse, de l’Insertion Professionnelle et du Service Civique.
– Pour une première sur le continent, la Côte d’Ivoire a récemment accueilli le 12è congrès mondial des politiques publiques de l’emploi autour des défis rencontrés par les acteurs des marchés du travail. La réalité est-elle aussi pressante dans votre pays qu’ailleurs en Afrique ?
MAMADOU TOURÉ – D’entrée de jeu, je dirais que la Côte d’Ivoire, à travers une structure de mon ministère, est membre de cette organisation mondiale, et nous avons été honorés l’année dernière d’avoir été choisis en tant que pays africain pour abriter cette importante rencontre qui, je rappelle, a réuni tous les services publics de plus de 88 pays dans le monde, les services publics de l’emploi, qui viennent de tous les cinq continents. Pour nous, c’est aussi une marque de reconnaissance aux efforts faits par notre pays ces quinze dernières années.
Il y a une problématique retrouvée un peu partout dans le monde, mais dont la réalité est plus manifeste en Afrique, c’est l’éternelle problématique de l’adéquation formation-emploi. Or, les acteurs du marché du travail sont de plus en plus exigeants sur le niveau de compétences techniques, donc de la main-d’œuvre, et malheureusement, nous avons une main-d’œuvre qui devient nombreuse, mais qui n’est pas forcément qualifiée, et c’est ce qui pose énormément de problèmes à beaucoup d’entreprises, surtout du secteur privé.
L’Afrique est une démographie importante. La population jeune va doubler d’ici 2050. Et tous ces jeunes, il faut d’abord les former, il faut leur trouver un emploi. Après, il faut trouver les voies et moyens de concilier cette démographie galopante avec le défi de former cette population de manière à leur donner les outils nécessaires à l’accès à des emplois qui leur permettent de vivre décemment. C’est le défi qui fait l’objet de nos réflexions à l’échelle internationale. Rassembler les services publics d’emploi des cinq continents lors du Forum a été l’occasion de mutualiser les expériences et favoriser l’inspiration.
Economie star en Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire est l’un des pays africains qui attirent le plus d’investissements directs étrangers (IDE). Les entreprises exogènes s’y installent donc en nombre. Que recherchent-elles le plus en termes de compétences et comment y répondez-vous ?
L’économie ivoirienne affiche un taux de croissance d’au moins 6 à 7 % par an, sur les 15 dernières années. Cela veut en effet dire qu’il y a beaucoup d’investissements, surtout venant du secteur privé et en particulier des entreprises étrangères. Nous avons des secteurs économiques importants qui sont en plein essor : le BTP, l’agriculture -avec une option claire prise sur la transformation de certains produits importants tels que le café, le cacao, l’anacarde… – l’économie numérique, avec toutes les évolutions qu’on a aujourd’hui issues de l’intelligence artificielle (IA), etc.
Dans le secteur de l’agro-industrie à titre d’exemple, il y a un réel besoin de main-d’œuvre. La stratégie gouvernementale, dans le cadre de la réforme adoptée en décembre 2016, consiste à réformer notre système de formation technique, afin d’anticiper et de former des jeunes dans ce domaine, afin qu’on ait beaucoup de jeunes compétents. Bien évidemment, le secteur privé est, lui-même, au cœur de cette réforme qui suit son cours. Nous sommes peut-être lents à définir les besoins de formation, puisque les formations sont orientées en fonction des besoins d’expertise des entreprises. Mais nous y travaillons.
Cette année est justement celle du bilan du Programme Jeunesse du Gouvernement 2023-2025 que vous pilotez. Alors qu’un des axes clés est l’accélération de la formation, l’insertion professionnelle et la promotion de l’entrepreneuriat, quelles avancées à date ?
Je dirai tout d’abord que l’innovation dans la conception de ce programme est la synergie d’actions gouvernementales. Ce sont 21 ministères sectoriels qui sont associés pour le concevoir de manière très cohérente. C’est un programme qui visait l’impact de 1,5 million de jeunes. Le gouvernement vient de faire le bilan des deux premières années sur lesquelles plus de 2,5 millions de jeunes ont été impactés et nous prévoyons d’atteindre environ 900 000 jeunes sur la dernière année. C’est-à-dire que nous aurons plus que doublé l’objectif de départ en termes d’impact. Ce qui est par ailleurs important dans ce programme, c’est le maillage territorial, car ce programme permet d’impacter les jeunes à la fois en milieu urbain et rural. Il est également transversal, car il touche toutes les couches de jeunes : étudiants, sans emploi, jeunes travailleurs ou entrepreneurs à devenir.
En Côte d’Ivoire, environ 30% de la population de 15 à 35 ans est frappée par le chômage. Alors que le pays ambitionne de faire émerger le maximum de jeunes talents dans divers domaines, comment abordez-vous
Permettez-moi de corriger ce chiffre. En réalité, le taux de chômage des 15-35 ans est de 4,5%. Lorsqu’on rassemble les jeunes au chômage et les jeunes en sous-emploi, le taux combiné affiche 27%. Mais le chômage en lui-même est relativement très bas. Parce que le défi que nous avons dans nos États africains, ce n’est pas le chômage, mais le sous-emploi des jeunes, parce que beaucoup de jeunes sont dans les secteurs informels et vivent des petits boulots. Ils échappent donc au chômage, mais il n’en demeure pas moins qu’ils font des boulots qui, souvent, ne leur permettent pas de joindre les deux bouts.
Notre défi est donc de réduire le taux d’informalité d’emploi des jeunes et de surtout de créer des emplois décents pour cette frange de la population. A cet effet, nous avons déployé ce que nous appelons « l’école de la deuxième chance » qui englobe toutes les solutions alternatives offertes aux jeunes en termes de formations à visée d’insertion, avec une plus grande chance de travailler. Outre donc la réponse structurelle qui est de renforcer la cohérence entre la formation et les besoins du secteur privé, « l’école de la deuxième chance » est une réponse forte apportée à la problématique de l’employabilité des jeunes.
Quelle place pour la Tech -qui mobilise les jeunes à travers le monde- au moment où la Côte d’Ivoire entend accélérer son industrialisation ?
C’est justement à cause de cette jeunesse très alerte sur tout ce qui est technologie que nous avons mis un accent sur nos startups et que nous avons mis en place le Startup Boost Capital, qui permet l’accompagnement des jeunes qui apportent des solutions innovantes y compris dans le domaine de la technologie. Je résumerais notre pensée en ce que la Côte d’Ivoire s’inscrit dans l’ère du temps en matière de talents. Nous avons, aujourd’hui, une transformation profonde du monde avec les nouveaux outils technologiques, les nouvelles approches du numérique et je vous assure qu’énormément de jeunes ivoiriens contribuent à la création de la richesse. Je citerai l’exemple du jeune qui a créé des drones livreurs des poches de sang dans les zones rurales ou qui permettent d’aider à la culture agricole. Énormément de jeunes qui sont lancés dans le domaine de l’innovation technologique bénéficient aujourd’hui d’un accompagnement de l’État et peuvent s’appuyer sur un fonds mis en place pour les aider. Et nous voulons qu’ils soient encore plus nombreux sur ces sujets stratégiques.
Ristel Tchounand
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